- C. Wolf, Médée, Voix
Christa Wolf peut avoir son idée sur la mort des enfants de Médée. Elle peut réécrire le mythe au bénéfice du personnage. Mais si malgré tout on a envie d'aimer Médée, c'est qu'à travers ses avatars tragiques un thème demeure inchangé, universel, infiniment actuel, et nous interpelle là où notre humanité n'a pas fini de nous surprendre : notre profonde sollicitude face à l'exil. Exil de l'autre qui pourrait bien être le nôtre, parce qu'il nous crie au visage et que nous restons cois :
"(...) Moi, Médée, je vous maudis.
Où vais-je aller. Y a-t-il un monde, une époque où j'aurais ma place ? Personne, ici, à qui le demander. Voilà la réponse."
Et les enfants ? Disparus de toute façon, en exil eux aussi. Destinés à la mort ?
"O mes enfants, mes enfants, vous avez donc une cité, une demeure où, m’abandonnant à mon malheur, vous vivrez pour toujours, privés de votre mère. Et moi je m’en irai en exil vers une autre terre avant de jouir de vous deux et de vous voir heureux, avant de vous avoir mariés, d’avoir paré votre couche nuptiale et levé pour vous les torches de l’hyménée"
-Euripide
Et toi, qu'on a reçu(e) en exilé(e), on te réserve ce qui, en toute occasion, te convient le mieux.
"On ne m’a que bannie ! ô bonté souveraine !
C’est donc une faveur, et non pas une peine !
Je reçois une grâce au lieu d’un châtiment !
Et mon exil encor doit un remerciement !"
- Racine
Mon exil me colle tellement à la peau, essentiel, existentiel. Aucune place n'est mienne. Je ne sais pas le concept de "place".
"Je fuis, Jason, je fuis; l'exil n'est pas nouveau pour moi; c'est la cause de l'exil qui est nouvelle."
- Sénèque
Homicides, impiétés, crimes de tout acabit, vous n'arriverez pas à en délimiter la portée ni la teneur. Médée est un tragédie en soi. Criminelle ou pas, jamais le sol ne s'affermit sous ses pieds.
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